La propriété intellectuelle est, de manière générale, un domaine peu compris des freelances.
Pourtant, il est important que tu saches que tes créations et productions numériques peuvent donner naissance à des droits d’auteur.
Que tu sois webdesigner, développeur, graphiste…, le droit protège tes créations originales pour éviter qu’elles ne soient utilisées illégalement.
La règle est simple. Tant que tu ne cèdes pas tes droits sur les œuvres originales que tu crées, tu en restes propriétaire. Attention donc aux confusions dans les relations avec tes clients !
Nous te proposons aujourd’hui de faire le point sur les droits que tu peux revendiquer en tant que créateur de produits numériques. Suis le guide !
Le droit ne protège pas n’importe quels de tes travaux. Il faut pour cela que tu crées des œuvres originales.
La loi ne définit pas ce concept. Ce sont les juges qui l’ont peu à peu clarifié… D’où ses contours mouvants.
Une œuvre originale est une œuvre empreinte de la personnalité de son auteur. En des termes plus simples, cela veut dire que l’œuvre doit être la matérialisation de tes propres idées, de ton style, de ta personnalité, etc.
Tu ne dois donc pas avoir reçu de consignes précises pour la réaliser. Si tu as conçu un produit numérique selon un cahier des charges très précis, sans réelle place à tes idées ni à ton imagination, ton travail ne sera pas considéré comme œuvre originale.
L’analyse se fera au cas par cas par un juge, à l’occasion d’un litige. Ce sera à toi de démontrer que ton œuvre est originale.
Par exemple, si tu crées des sites web, tu devras prouver que tu as bénéficié d’une marge de manœuvre suffisante pour appliquer tes propres idées créatives. L’idée sera de montrer que tu as fourni un effort intellectuel mais aussi créatif.
L’équation est simple. Si ton produit n’est pas qualifiable d’œuvre originale, tu ne pourras pas revendiquer tes droits d’auteur. Attention donc aux raccourcis !
Comprendre ce que recouvre la notion de droits d’auteur
Les droits d’auteur du freelance se divisent en deux catégories : les droits patrimoniaux, et le droit moral. Attention à ne pas les confondre : leurs caractéristiques sont diamétralement opposées.
Les droits d’exploitation représentent le versant patrimonial de tes droits d’auteur.
Ils comprennent principalement le droit de reproduction et le droit de représentation. Il en existe d’autres déclinaisons, comme le droit d'adaptation, de traduction, ou encore de cession à des tiers.
Monétisables, ils peuvent faire l’objet d’une cession.
Le droit moral est intimement rattaché à la personne du créateur de l’œuvre originale.
Il signifie qu’en tant que créateur, tu as droit au respect de ton nom, de ta qualité et de ton travail.
Au contraire des droits patrimoniaux, le droit moral ne se monétise pas. Impossible de le transmettre !
Le droit moral sur ton produit est imprescriptible, c’est-à-dire qu’il ne prend jamais fin. Et ce, même après ta mort.
En tant que créateur d’une œuvre originale, tu en es propriétaire. Et ce, même si ton client t’a rémunéré pour ton temps et tes compétences. Tu peux donc mesurer pleinement l’enjeu des droits d’auteur en freelance !
Si tu souhaites accorder à ton client une utilisation pleine et entière de ton travail, vous devez signer un contrat ou une clause de cession de droits d’auteur.
Évidemment, seuls les droits d'exploitation sont transmis. Tu procèdes alors à une autorisation d’exploitation de tes produits numériques, selon des conditions prédéfinies.
Avant de penser à la cession de tes droits, il faut que tu procèdes à certaines vérifications. Il est aisé de commettre des erreurs en voulant céder ses droits d’auteur en freelance.
Sache qu’il est impossible pour toi de céder des droits sur une réalisation qui ne t’appartient pas en totalité.
En effet, lors de la conception de tes produits numériques, tu t’es peut-être appuyé sur d’autres œuvres existantes. Tel sera le cas si tu as utilisé des graphismes, des photographies… protégés par le droit d’auteur de leur auteur.
Avant de céder tes produits numériques, il faut donc que tu sois sûr d’en posséder tous les droits. Si ce n’est pas le cas, il faudra que tu obtiennes les droits d’auteur qu’il te manque.
Tu pourras ensuite t’attaquer à l’aspect rédactionnel de la cession de tes droits.
Il est important d’être particulièrement clair et précautionneux lors de la rédaction des clauses de cession de droits dans tes contrats.
En effet, si la clause est imprécise, elle sera interprétée en ta faveur devant le juge. Pour minimiser le risque de litiges ultérieurs, il est nécessaire d’être le plus explicite et complet possible.
D’ailleurs, le droit ne te laisse pas le choix ! Il existe en effet des mentions obligatoires à faire figurer dans tes clauses de cession de droits d’auteur. Elles ont pour objectif d’éviter les abus et de protéger les droits des créateurs.
Il faudra ainsi faire apparaître :
Exemple de clause pour un site Internet : « Cession des droits de représentation et de reproduction pour une diffusion mondiale sur [URL site client], pour une durée de [X] ans ».
Oublie les mentions vagues telles que “tous droits cédés”. Il te faut décrire explicitement les droits concernés et les conditions de cession. Sinon, la cession pourra être annulée.
Il ne faut pas hésiter à élargir dès le départ les conditions d’exploitation dans la clause. Cela évitera de devoir établir ultérieurement un nouveau contrat… ou de se rendre devant le juge !
La cession des droits d’auteur en freelance donne lieu à rémunération. Celle-ci sera mentionnée sur ton devis et ta facture. Elle se distingue naturellement de tes honoraires de création.
La rémunération de tes droits d’auteur en freelance doit être juste et équitable.
Il existe deux moyens permettant de déterminer le prix de cession de tes droits d’auteur :
Afin de t’aider, tu trouveras ci-dessous quelques exemples de chiffrage des droits d’auteur.
Attention : il n’existe aucune règle absolue. Le prix se détermine en principe en fonction de l’étendue des conditions d’exploitation convenues et du gabarit de ton client. Ce sera surtout une affaire de négociation !
Imaginons un site Internet entièrement designé sur mesure pour 10 000 € (honoraires de création), pour un client important. S’ajoutent 5 000 € de droits d’exploitation pour une diffusion mondiale sur 10 ans.
Soit l’application d’un pourcentage de 50% sur le prix de conception du site Internet, justifié par l’étendue de l’autorisation d’exploitation et l’envergure du business de ton client.
Prenons l’exemple d’un logo chiffré à 1 200 € (honoraires de création). S’ajoutent 500 € de droits d’exploitation sur 5 ans pour une diffusion mondiale.
Soit l’application d’un pourcentage de 40% sur le prix de conception de ton logo, justifié par l’étendue de l’autorisation d’exploitation.
Sache en outre qu’il existe un simulateur plutôt performant pour t’aider à chiffrer tes projets de logos.
Il existe un barème officiel pour le calcul des droits sur les œuvres publicitaires, publié au JO. Son utilisation est un peu plus complexe que la seule application d’un pourcentage à tes honoraires de création. Renseigne-toi pour bien le comprendre.
Imaginons que tu as designé un poster imprimé en 3 200 exemplaires. Si l’on utilise le barème avec une valeur de point à 5 €, la cession de tes droits est évaluée à 400 €.
Enfin, si tu réalises de petits projets et que tu ne veux pas t’embêter… Tu peux aussi intégrer la rémunération de tes droits d’auteur directement dans ton tarif journalier. Il n’y aura donc pas ventilation du prix sur ton devis, ni sur ta facture.
Tu l’auras compris : en matière de propriété intellectuelle, vigilance et rigueur sont de mise. Tu as maintenant les clés en main pour comprendre comment le droit protège tes produits numériques !